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Nguyễn Chí Công, CFLS

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Hơn 30 năm hợp tác với Việt Nam

Plus de 30 ans de coopération avec le Vietnam

Chủ Nhật 11, Tháng Mười Một 2007

Ce livre a été publié par le CCSTVN à la mémoire d’un grand scientifique, Henri Van Regemorter (photo), qui toute sa vie a milité pour la paix et s’est engagé dans l’aide au développement, particulièrement avec le Vietnam.

Mais cet ouvrage auquel ont participé une cinquantaine d’auteurs n’est pas une biographie : il montre comment une lutte politique contre la guerre américaine dans le cadre du « Collectif intersyndical universitaire » s’accompagnait d’une aide concrète aux scientifiques du Vietnam, puis comment après la guerre ces efforts se sont poursuivis pour l’aide au développement, depuis 1973 et encore maintenant.

La plus grande partie décrit concrètement les actions menées par le CCSTVN (une association qui n’est pas une OSI humanitaire) pour initier et assurer le suivi de coopérations avec ses collègues étrangers, tout en collaborant avec les autorités des pays partenaires. On lira de nombreux rapports des acteurs de coopérations et de formation : universitaires, ingénieurs, techniciens, chercheurs français et vietnamiens ensemble, et en appui aux coopérations d’organismes tels que le Ministère des affaires étrangères (MAE), le CNRS, la Francophonie, les Universités. Ces expériences vécues intéresseront tous ceux qui sont concernés par les relations entre pays industrialisés et pays en développement ou pays émergents.

On verra que des militants de gauche, Henri Van Regemorter particulièrement, agirent dès les années 50 contre la guerre française en Indochine. Puis, dès les débuts de la guerre américaine, à l’initiative de Madeleine Rebérioux et de quelques autres, fut créé le « Collectif intersyndical universitaire » regroupant des centaines de scientifiques menant campagne contre cette guerre. Outre les nombreuses actions politiques, une aide au Vietnam en lutte se concrétisait par l’envoi de nombreux livres et revues ainsi que de matériels médical et scientifique, notamment un microscope électronique pour l’Institut d’hygiène et d’épidémiologie de Hanoï. Après la défaite américaine en 1975 le Vietnam devait s’engager vers la reconstruction et le développement, d’où la création de l’association : « Comité pour la Coopération Scientifique et Technique avec le Vietnam » à partir de militants du Collectif intersyndical universitaire et d’autres volontaires.

Le Vietnam, pays anciennement féodal, puis colonisé, ayant supporté plusieurs guerres, trop longtemps isolé, faisant partie du « Tiers monde » devait se réinsérer dans la communauté internationale. Certes, pendant les années de guerre le gouvernement vietnamien prévoyant la reconstruction avait envoyé de nombreux jeunes étudier dans les « Pays de l’Est », mais pour appréhender les sciences et les techniques modernes il fallait se tourner vers les pays occidentaux. Quoique la plupart des gouvernements à la remorque des USA évitaient les relations avec le Vietnam, la France pouvait être un partenaire privilégié car de nombreux cadres vietnamiens ayant suivi leurs études pendant la période coloniale parlaient parfaitement le français et les relations étaient facilitées. Pendant les périodes troublées les gouvernements français maintenaient des contacts à travers de petites coopérations mais en 1977 la venue en France du Premier ministre vietnamien M. Pham Van Dong, officialisait les coopérations entre la France et le Viet Nam par la signature d’un accord-cadre qui mettait en place la coopération culturelle scientifique et technique d’une part et la coopération industrielle et économique d’autre part. Le contenu de ces coopérations devait être précisé tous les deux ans lors de la réunion de commissions mixtes. Si la commission mixte pour la coopération culturelle scientifique et technique s’est réunie à peu près régulièrement, celle sur la coopération économique et industrielle fut suspendue du fait de l’embargo contre le Vietnam dès 1979. Les relations étant établies de longue date avec les militants français du Collectif puis du CCSTVN, de premières actions étaient immédiatement initiées. Les crédits étant particulièrement faibles, les coopérants français faisaient des prouesses pour les compléter et les rentabiliser. Ces crédits étant annuels donc aléatoires, il était prudent de découper les projets de telle sorte qu’ils soient utiles même en cas d’interruption.

Pour ajuster les actions il faut tenir compte des conditions du pays d’accueil, des possibilités et limites du pays industrialisé, des moyens humains et financiers de part et d’autre. Pour bien comprendre les problèmes, les freins, les blocages, un climat de confiance réciproque est primordial et il ne s’acquiert qu’au fur et à mesure de travaux entre partenaires français et vietnamiens s’expliquant franchement. Les Français n’hésitaient pas à signaler au côté vietnamien ce qui leur semblait négatif, les Vietnamiens expliquaient les raisons des difficultés, et chacun des partenaires pouvait prendre conscience des insuffisances et lourdeurs de part et d’autre. D’ailleurs, malicieusement on nous faisait remarquer que l’administration vietnamienne avait été influencée par l’administration française dont elle avait pris la suite… Grâce aux relations de confiance entre Henri Van Regemorter et des autorités vietnamiennes au plus haut niveau, des pratiques peu démocratiques furent dénoncées : ainsi la limitation des relations entre Vietnamiens et Français fut assouplie, les coopérations directes entre organismes français et vietnamiens facilitées, on pouvait débattre des projets en discutant des priorités. Sans ambiguïté, le Comité excluant tout favoritisme, les projets étaient clairement exposés aussi bien côté vietnamien que côté français. Du côté français les responsables au MAE constataient que loin de les supplanter le CCSTVN facilitait le travail et aidait à rentabiliser les coopérations. Parfois, agissant comme intermédiaire officieux, le Comité pouvait sonder un côté ou l’autre sur quelque proposition sans que cela engage les relations officielles. Souvent, pour préparer les commissions mixtes les partenaires de terrain élaboraient ensemble des propositions qui étaient ensuite transmises au MAE par les coopérants français et aux autorités vietnamiennes par leurs homologues vietnamiens. La commission mixte pouvait alors arbitrer sur des programmes réalistes.

La collection des « bulletins du CCSTVN » illustre les objectifs, méthodes, progrès de cette coopération critique et constructive. Le livre, Vietnam une coopération exemplaire, résume tout ce processus et détaille les réalisations dans près d’une vingtaine de domaines ; même si tous n’y sont pas présentés on relate la mise en place à Ho Chi Minh Ville du Centre de Service d’analyses et d’expérimentation qui fut l’objet d’une grosse coopération impliquant plusieurs administrations sur plusieurs années ; les formations en biologie fondamentale et les applications en médecine ou en agronomie ; les coopérations entre Instituts Pasteurs ; les travaux en chimie et dans le domaine de l’eau ; l’informatique qui permit au Vietnam de coller aux progrès rapides dans ce domaine ; les formations techniques ; etc.

Toutefois les formations techniques pâtirent de certains défauts français et vietnamiens. Des coopérants français d’universités ou instituts d’État sont assez facilement disponibles pour de courtes périodes, mais des formateurs, ingénieurs ou techniciens du privé, agissant le plus souvent sur leur temps de congé, sont beaucoup moins nombreux. Au début des années 80 le Ministère de la recherche et de l’industrie proposait de faciliter la disponibilité de spécialistes du privé pour coopérer mais cette idée n’a pas eu de suite. Une entreprise obtenant un contrat organisera des formations (coûteuses) sur ses produits spécifiques, au détriment de connaissances plus larges permettant aux spécialistes vietnamiens de mieux connaître l’éventail des produits sur le marché.

La coopération classique consiste à former des formateurs dans des universités ou autres écoles en espérant qu’ils formeront ensuite les futurs cadres, ingénieurs, techniciens, d’administrations, entreprises ou services. Mais pour être efficace il faut de l’expérience : dans un pays industrialisé les jeunes sortant des écoles commencent leur carrière en travaillant avec des professionnels déjà expérimentés qui leur transmettent le savoir faire. Dans un pays où une technique n’existe pas encore, donc sans ingénieurs ni techniciens d’expérience, il faut acquérir à la fois les connaissances et la pratique concrète qui fait défaut dans des formations trop théoriques. Un pays comme le Vietnam où les lettrés sont valorisés depuis des siècles dispose d’un atout favorable pour développer des formations universitaires, mais souvent un doctorat, résultat d’un travail individuel, était nécessaire pour diriger des groupes d’unités productives. En visant plus souvent des diplômes que des compétences pratiques, avec des enseignements trop théoriques les filières techniques ont été longtemps négligées. L’importance de former en nombre des ingénieurs et techniciens de différents niveaux a tardé à être reconnue. Mais maintenant la possibilité de trouver au Vietnam des emplois rémunérateurs dans ces spécialités encourage les formations techniques.

Sur le long terme on constate que les actions militantes et politiques se sont transformées en coopérations scientifiques, techniques et de formations, alors que la guerre économique mondiale a remplacé la guerre armée au Vietnam et la guerre froide Est-Ouest. Devant la suprématie des pays industrialisés, les pays en développement doivent disposer de personnels aptes à comprendre et évaluer ce qui leur est proposé par les pays riches. En effet, l’apport de solutions extérieures toutes faites, sous forme de « transferts d’usines » par exemple, a fait fiasco avec ses « éléphants blancs ». Un moyen de rééquilibrer les relations entre clients vietnamiens et fournisseurs étrangers était de former des spécialistes vietnamiens pouvant évaluer et choisir les systèmes réellement utiles au pays, les technologies adaptées : ni obsolètes ni trop sophistiquées et coûteuses. De plus les spécialistes particulièrement compétents et réalistes peuvent servir de conseillers auprès des entreprises ou administrations, et contribuer avec les autorités à l’élaboration de planifications. C’est ce qui a été réussi avec le Vietnam dans quelques domaines au point qu’un certain nombre de Vietnamiens ont maintenant un niveau suffisant pour contribuer à des recherches ou travaux de niveau international, voire à proposer des solutions originales dont des pays comme la France pourraient profiter. Mais au risque de la fuite des cerveaux intéressant les pays occidentaux, au détriment du pays d’origine…

Les réticences de certains milieux politiques concernant les coopérations avec des pays comme le Vietnam n’ont pas limité les coopérations militantes. Nous vivons dans le monde actuel, avec ses problèmes : sauf à s’interdire d’agir, on peut pas exiger que le pays avec lequel on coopère ait une politique telle qu’on le souhaiterait et un régime soi-disant idéal. Les coopérations se pratiquent entre le Vietnam tel qu’il est et la France telle qu’elle est. Les relations ne peuvent qu’améliorer la compréhension des problèmes internationaux et des risques d’un mondialisation “libérale”. Le militantisme, l’internationalisme, sont toujours d’actualité pour une autre mondialisation.

Par Alain Teissonnière, secrétaire général du Comité pour la Coopération Scientifique et Technique avec le Viet Nam (CCSTVN).

Source :
- Nouveaux regards n° 29, avril-juin 2005
- "Vietnam, une coopération exemplaire, Henri Van Regemorter (1925-2002) Parcours d’un militant", L’Harmattan, 2004